Jazz-Rhone-Alpes.com

Les pérégrinations jazzistiques

vu le lundi 10 octobre 2011

Les Violons Barbares au RhinoJazz(s)

Le mot barbare doit être pris ici dans son sens originel d'étranger. La musique que "Les Violons Barbares" nous donnent à entendre n'a en effet rien de rustique ni de grossier, bien au contraire. En revanche elle dévaste toute les certitudes musicales que l'on pourrait avoir avant de les entendre.

On connaît un peu le mille-feuille culturel des Balkans avec ses rythmiques déroutantes à cinq, six, sept, neuf, onze, voire treize ou quinze temps et ses sonorités mélangées d'origines celtes, turques, tsiganes et occidentales. Il est difficile d'imaginer ce que peut donner la rencontre d'un musicien issu de la tradition musicale des Balkans avec un musicien issu de la tradition musicale mongole. C'est un mélange étonnant qui crée de nouvelles sensations, défriche des espaces inconnus jusque là. La musique des Violons Barbares mêle avec allégresse chant de gorge et chant diphonique mongol, polyphonie bulgare, percussions ethniques, ballade afghane et compositions originales. Allégresse n'est pas un vain mot tant la chaleur de l'interprétation et le plaisir des musiciens à jouer ensemble sont communicatifs.

Personne ne peut dire ce que cette musique aurait à voir avec le jazz proprement dit si ce n'est cette liberté dans l'interprétation et cette faculté des musiciens à laisser libre cours à l'improvisation. Pour des amateurs de jazz toujours à l'affût de l'étonnement musical, c'est un vrai plaisir. Pour le public du Majestic le plaisir et l'enthousiasme étaient évidents, trois rappels des spectateurs, debouts, qui trépignent et battent des mains, ça vaut son pesant d'émerveillement.

Michel Mathais

(Dimitar Gougov: gadulka (vièle à 3 cordes bulgare) et chant ; Dandarvaantchig Enkhjargal - dit "Epi": morin khuur (vièle à 2 cordes de Mongolie), chant de gorge, chant diphonique ; Fabien Guyot: percussions, chant)

vu le mardi11 octobre 2011

Jean-Louis Matinier & Marco Ambrosini à l'AmphiOpéra pour le RhinoJazz(s)

Le Rhino explore aux marches de ses terres ligériennes. Le voici à l'AmphiOpéra de Lyon. Non content d'être SDF pour un soir, il propose un spectacle hybride où l'accordéon de Jean-Louis Matinier convole avec un animal bizarre, un nyckelharpa *, sorte de violon allongé doté d'un gros manche disgracieux qui supporte des touches ou des clés. Le tout se jouant avec un archet riquiqui tenu par Marco Ambrosini, dompteur de la bête.

Voilà donc ces deux instruments dissemblables réunis par un duo qui mâtine musique baroque et compositions contemporaines. Les deux musiciens sont bien seuls au centre de la scène de l'AmphiOpéra. Ils ne se préoccupent visiblement pas du tout du public, ils sont tout à leur musique et à leur discours musical quasi amoureux. Malgré cette distance, le public apprécie et reçoit ce concert comme des tableaux, avec des palettes impressionnistes. Un peu comme des histoires illustrées avec des ambiances, une matière modelée en vagues et en rondeurs.

C'est une des marques de fabrique du RhinoJazz(s)que de nous faire découvrir des associations nouvelles ou en tout cas osées. Il n'est qu'à entendre la chaleur des applaudissements à l'issue du concert pour mesurer que ce concert original a plu.

Pascal Derathé avec la complicité de Christophe Charpenel

* : Plus d'infos sur le nyckelharpa ici

Marc Thomas et Olivier Truchot au Second Souffle

Marc Thomas se produit en ce moment sur quelques scènes de la région avec son pote Olivier Truchot et d'autres. Ce soir ils font escale en duo au Second Souffle pour offrir un dîner-concert de qualité aux clients du restaurant. Avec le crooner pas de surprise, on écluse le realbook et on retrouve donc des standards archi-entendus et qu'on réécoute avec un plaisir neuf à chaque fois. Tout en guettant la petite pirouette que ne manque jamais Marc Thomas. Au détour des deux sets on entendra Moonlight in Vermont, Sweet Lorraine, There will never be another you décliné avec forces oeillades à destination d'une jolie cliente, Georgia on my mind ou encore Bye bye blackbird.

Claire Geraghty, de passage au Second Souffle, nous offrira un The nearness of you.

Petite soirée de jazz vocal bien agréable au Second Souffle.

Tickle au Shag Café

Malcolm Potter, il y a quelques années, avec quelques lascars, avait formé le groupe Tickle Swing qui reprenait essentiellement des morceaux des Swing Session, un répertoire swing très dynamique, presque rock'n'roll. Le groupe a vécu et un disque avait vu le jour "jive parade". Depuis un an, le groupe s'est reformé, et joue régulièrement au Shag Café, le répertoire a évolué vers un swing plus en rondeur auquel la guitare de Yves Gariod donnait un air canaille. Aujourd'hui, les Tickle entament une deuxième saison au Shag Café, la formation ne se produisant pour l'instant qu'en ce lieu dédié au swing. La guitare a disparue et un ancien des tickle swing a repris du service : Ivan Baldet vient ajouter la chaleur, le velouté de son saxophone à l'ensemble. La volonté est d'effacer peu à peu les tonalités trop rock pour privilégier le swing, ce qui dans le jazz met du pétillant dans les jambes.

Malcolm l'avoue en avant concert, le saxophone est là pour apporter de la sensualité à l'orchestration. Cela marche. Oui, et ça claque aussi, l'énergie reste au rendez-vous. Pour exemples : un after you've gone où Baldet se déchaine, suivi d'un court solo de piano, jovial, enlevé, sympathique, de monsieur Potter lui-même, puis un Kiss de prince (morceau décidément très revisité par le jazz) très cool, très crooner, presque un blues, avec un arrangement très travaillé et un final qui n'en finit pas avec trois reprises initiées par un Patrick Argentier ( à la basse) goguenard ; et encore un route 66, où le sax emballe tout, ou encore un When I'm sixty four des Beatles euphorisant, et aussi l'indéboulonnable Bye bye black bird précédant un I wanna be like you qui remplit la piste de danseur , là Disney est à l'honneur et rien a dire : Prima çà swingue ! La fin de soirée est très enlevée avec un Saint Louis Blues labellisé "no comment"... l'ai-je dit : l'apparition du saxophone dans cette formation est inestimable, et le sax alto, précisément là, nous le révèle d'avantage encore. Malcolm Potter conclue modestement en annonçant que la nouvelle mouture du groupe s'améliorera de concert en concert : cela promet !!!

Marc Tresve

vu le mercredi 12 octobre 2011

Matthieu Llodra au Jazz Club d'Annecy pour le Jazz Contreband

Dans le cadre du Festival JazzContreband qui offre une foultitude de concerts sur les Savoies et Genève jusque fin octobre, le Jazz Club d'Annecy recevait le trio de Matthieu Llodra au piano, et ses hommes de main, Fabien Iannone à la contrebasse, et Maxence Sibille aux drums. Trois titres originaux Puppirge 45, Alone, Atmospheric Bounce, et une reprise, Freedom Jazz Dance d'Eddie Harris, dans la veine des grandes références classiques. Malgré le très jeune âge du leader, l'ensemble fait preuve de maturité et d'une réelle maîtrise du set qui augurent de belles perspectives. A suivre....

Marc Thomas quartet au Jazz Club d'Annecy pour le JazzContreband

En deuxième partie, une valeur confirmée. Marc Thomas, un des rares chanteurs de jazz qui ne fait pas business d'inflexions et effets de voix, comme d'autres, d'effets de manche. S'il est bien une discipline qui ne souffre pas l'approximation, c'est celle-là. Impardonnable, comme l'aquarelle. A moi la peur, le scat poüet-poüet, la bossa liquide et les yodleries du coucourou crooner qui connaît des raccourcis qui rallongent. Marc Thomas, c'est tout le contraire. Sobre, élégant, en place, à sa place, et ce grain de voix exceptionnel.

Et la gageure; un répertoire de standards usés jusqu'à la corde qui pourrait se révéler d'un ennui mortel par -même- des très bons, et qui ce soir, clinque, comme clinquant, du verbe... clinquer. Too close for comfort, Triste, Just in time, Route 66, et un peu de ténor, Time after time, Teach me tonight, Come rain or come shine, Dindi, Everyday I have the blues... Marc Thomas tourne les pages des realbooks. Et on adore ! Evidemment, il ne fait pas ça tout seul, n'exagérons pas. A l'orgue Hammond, un homme à la hauteur, Olivier Truchot, remarquablement discret, euh....trop, ce soir. Alain Richard, drummer annécien, mais pas seulement, qui a initié cette nouvelle rencontre, et une découverte, Thibaut François, guitariste -très jolie cette blonde Bélier- au jeu clair -et look de Gavroche-, précis, pertinent, très lyrique .

Je suis souvent admiratif devant la capacité des musiciens talentueux à s'effacer. A tort, sideman c'est plaisant aussi.

Gérard Gabalde de Casamajor

Grazzia Giù et Lionel Melot en duo au Shag-Café

Pour un concert en duo, dans le cadre des mercredis jazz du Shag-Café, Grazzia Giu a concocté un programme original et personnel. Le public dîne et les premières minutes sont essentielles pour captiver l'auditoire. Mission Possible, annonce la chanteuse, le titre du premier morceau expliqué avec son accent charmant : public captif. L'ambiance restera ainsi : intimiste tout au long de la soirée, la chanteuse nous emmenant dans son univers sonore avec une délicatesse extrême. Car, hors son talent, et la qualité des musiciens qui l'accompagne, l'une des spécificités de Grazzia Giu, sa patte si l'on peut dire, c'est la création de cet univers particulier qui s'articule autour de morceaux qui flirtent tant avec la pop, le reggae même, qu'avec l'expérimental, mais toujours accessibles, quasiment romantiques à force de douceur.

Beaucoup de nouveaux morceaux (compositions et reprises) et quelques classiques, tel Cry me a river, font fondre l'auditoire qui en oublie son repas.

Le second set commence par un morceau de piano de Lionel Melot, Avant midi, superbe ; ce pianiste-là a du coffre, de l'imagination : ça décoiffe, ça calme, conclue Grazzia admirative. Pour le morceau qui suit, elle s'installe elle-même au piano et interprète un Mother of all intimiste, délicat, articulé autour de quatre accords qui tournent avec variation comme des samples. Pour Summertime, Grazzia l'annonce : elle suit les humeurs chaque fois changeantes de Lionel, elle suit son voyage. Immédiatement on se laisse surprendre car il s'agit semble-t-il d'une version asiatique, puis très vite les intonations de voix bifurquent vers un registre à la Björk. Une version donc très expérimentale, exceptionnelle. L'artiste conclue la soirée par un rappel mérité et enthousiaste : I'm calling you, le thème du film Bagdad café qui était entré dans son répertoire à l'occasion de son précédent passage au Shag Café, et qui s'est bonifié sans conteste.

Marc Tresve

Laurent Derache trio à la Clef de Voûte

Ceux qui lisent cet article sans avoir assisté à ce concert sont malheureux, car si le public présent un mercredi soir était plutôt modeste, la musique et le talent des musiciens était grand, très grand !

Les présents on eu la chance d'entendre le Laurent Derache trio, vainqueur du Tremplin National du festival Jazz à Vannes 2011. Le concert démarre avec un son énorme, riche et sculpté et malgré la puissance de la musique on ne perd pas de vue un instant la contribution de chacun des instruments bien contrastée. Ouriel Ellert joue sur une basse électrique avec une technique étonnante et agréable, ce n'est ni du rock ni de la contrebasse acoustique typique du jazz, et elle se marie très efficacement la grande richesse de l'accordéon chromatique de Laurent Derache, instrument rare pour le jazz. De même pour le fond rythmique fourni par Martin Wangermée à la batterie. Leur prestation est passionnante, fascinante, pro. La cohésion et la complicité des musiciens encore plus étonnantes quand on apprend qu'ils travaillent en trio depuis seulement un peu plus qu'un an.

Le programme est entièrement constitué de compositions de Laurent, presque une dizaine, chacune plus intéressante que la précédente dans le déroulement du concert. Un jazz qui échappe à une classification facile, avec des influences des power trios, du rock, du classique, du post-bop. On ne peut que regretter que le magnifique Life on Venus ne se trouve pas sur leur petit CD (un EP de promotion) ; heureusement Memory et Debout y sont. Tous les morceaux sont bien reçus par le public ; par les applaudissements on dirait qu'il y en a le triple dans la salle. On attend avec impatience une sortie de leur CD, d'ici quelques mois, et, bien sûr, l'opportunité de revoir ce trio de nouveau sur scène.

Judy Rankin

Le trio "partagé" aux Saveurs Partagées

Encore un lieu accueillant pour les musiciens. Décidément les pentes de la Croix Rousse sont propices à ça.

Juste à côté de la Clef de Voûte, Thierry a repris un restaurant. Il fonctionne sur des produits frais et une carte abordable.

Dans l'entrée de son établissement il a aménagé une petite scène. Ce soir c'est le premier concert de jazz avec un trio de circonstance , le "trio partagé". Initiative menée par le guitariste Julien Sermet, qui s'est adjoint le batteur Zaza Desiderio (dont on parle beaucoup en ce moment, en bien) et l'harmoniciste Jérémie Soulas, également sax soprano. Pour l'occasion, le sax alto Sébastien Félix s'est invité et le trio augmenté nous joue quelques compositions et des impros.

Le lieu programme de nouvelles soirées jazz, voir l'agenda.

Pascal Derathé

(Saveurs Paratagées : 2 rue Camille Jordan - Lyon 4ème)

vu le jeudi 13 octobre 2011

European Jazz Trumpets à l'Auditorium de la Cité des Arts de Chambéry : Trompettes en délire

"Chagrin et joie dépendent plus de ce que nous sommes que de ce qui nous arrive" (Idées - 1865) Multatuli, 1820-1887.

Pour cette cinquième soirée du Savoie d'Jazz Festival à Chambéry, les programmateurs ont mis les petits plats dans les grands en présentant une formation inédite et une création l'European Jazz Trumpets, initiée par Pierre Drevet dans l'esprit de Georges Gruntz né en 1932 à Berne (pianiste, organiste, compositeur et arrangeur) qui a travaillé pour : ''Phil Woods, Don Cherry, Chet Baker, Dexter Gordon, Johnny Griffin, Art Farmer, Daniel Humair, etc... En d'autres termes, une des références emblématiques du jazz suisse, dans un style brass et jazz. Beaucoup d'analogies au demeurant avec Pierre Drevet.

La formation sur scène, par la présence de musiciens étrangers (suisse, hollandais, cubain, allemand, italo-suisse)justifie pleinement son appellation. Elle va porter haut les couleurs et les variations-improvisations du jazz. Ce n'est pas un big band, mais ça s'en rapproche diantrement, six trompettes et quels trompettistes ! : Serge Plume, Claude Egéa, Claus Stoetter, Carlo Nardozza, Pierre Drevet (compositions et arrangements) et Denis Leloup (trompette basse et compositions) associés à Jean Paul Hervé (guitare), Rémi Goutin (piano fender et compositions), Ivor Malherbe ( basse et contrebasse), Antoine Brouze (batterie) et Isel Rasua (percussions). Le spectacle sera n'en doutons pas d'envergure, on ne va pas s'ennuyer !

Et ça démarre fort avec : Welcome le bien nommé de M. Michel, les cuivres sonnent, la rythmique est en place, tout est en place ! Des professionnels ! La tonalité de la soirée est donnée, pour une création, c'est une création ! Mais compte tenu du profil de chacun des participants, pouvait-d'on s'attendre à autre chose ? L'art de la trompette est à cet instant porté à son plus haut niveau musical et sans ostentation. Suivra une composition de F. Ambrosetti avec des arrangements de G.Gruntz : Hot Diggety Damn, puis Padave de Denis Leloup qui permit à Denis et à Isel Rasua de s'engager dans un dialogue bien tempéré , Anticipation des mêmes Ambrosetti et Guntz,et un chorus de Claus Stoetter ; un pur régal.

For Kenny de Pierre Drevet, donnera le pendant aux impétrants sus-nommés, et un petit tour avec Rémi Goutin pour Valse à Caluire voilà qui devrait ravir les lyonnais. Déjà comblé par tant de prouesses, la suite se devait d'être royale, et elle le fut, en fait c'est à un festival dans le festival auquel Pierre Drevet nous convia avec la participation active de : Denis Leloup, Claus Stoetter, la rythmique ; Antoine Brousse et Isel Rasua dans des compositions du monsieur Loyal de la soirée : Pierre Devret, à savoir : Hirondelle, Suite Agitée I & II (chorus de Carlo Nardozza et Ivor Malherbe), et Suite III qui permit à Jean Paul Hervé de faire étalage de son talent à la guitare, accompagné de l'ensemble de l'European Jazz Trumpets qui pourtant libéra les énergies de l'orchestre dans des ruptures-reprises harmoniques furieuses.

On s'achemine alors vers le terme de cette mémorable soirée que l'on peut définir comme un spectacle total, en cela qu'il aura développé tout au cours de la représentation une thématique musicale riche en harmonies et en complexité dans ses lignes syntaxiques. Mais, le maître de céans, avait concocté une sortie qui ne pouvait qu'être à la hauteur des lignes développées plus haut. Georges Gruntz fut mis à contribution, à travers ses compositions ; Faddis Burger et Spring Song qui permis à Claude Egéa de nous régaler d'un son que lui seul sait offrir. La conclusion finale revient à Maître Pierre dans un ultime rappel interprétant Premier Prix un clin d'œil de bon aloi ! Et c'est ainsi que dans un Auditorium au complet, se termina cette création du E.J.T (European Jazz Trumpets). Longue vie à ce nouvel ensemble qui saura trouver sa place au côté des célèbres O.N.J et P.J.B.B.

Alain Bailly

Michel Petrucciani au Tobbogan (le film)

Très belle initiative de la part du Toboggan (Centre culturel de Décines ) que d'organiser cette soirée autour du film de Michael Radford sur Michel Petrucciani.

Nous avons déjà évoqué ici ce très beau film sur l'un des plus "grands" pianistes du jazz français mort à trente-six ans en 1999.

Le film est sorti autour du 15 août dans une seule salle à Lyon, le Comoedia, autant dire que seuls quelques chanceux motivés ont eu le plaisir de le voir.

Aussi, cette soirée spéciale de rattrapage était la bienvenue, d'autant plus qu'elle était élégamment accompagnée d'un "échange" animé par David Bressat, pianiste et professeur de jazz, figure bien connue de la scène jazz régionale.

David Bressat a évoqué le film, pour susciter l'échange, et a évoqué la technique pianistique de Michel Petrucciani en l'illustrant au piano par quelques standards que Michel aimait jouer (These Foolish Things...) et quelques-un des ses propres morceaux (Suite brésilienne, Rachid ...)

Avec beaucoup d'humilité et une bonne dose de talent David Bressat a rendu hommage à cette figure atypique que fut Michel Petrucciani dans l'univers du jazz.

L'échange a bien eu lieu, beaucoup de personnes se sont exprimées, quelques-unes juste pour dire leur admiration envers l'artiste et le plaisir que leur avait procuré le film. Gérard Vidon, qui fut pendant 20 ans président du Hot Club de Lyon (co-organisateur de la soirée) a évoqué ses souvenirs des passages de Michel Petrucciani au club avec quelques anecdotes poignantes.

Une très belle soirée donc, pleine de talent et de simplicité, pour cette étoile filante que fut Michel, l'homme qui a vécu en accéléré, toujours à 150% et qui voulait "juste marcher sur la plage, une femme à ses côtés."

Jean-Marc Aguirre

vu le vendredi 14 octobre 2011

Lenny Lafargue & Les Moustiques Du Bayou étaient à Doizieux pour le RhinoJazz(s)

Vieux routier du blues, Lenny Lafargue sillonne depuis quelques décennies les routes de France et d'Europe à partir de son sud-ouest natal. C'est dans une petite salle de théâtre installée dans les bâtiments d'une ancienne usine qu'il avait pour un soir posé son sac et sortit sa guitare. C'était un cadre idéal pour ce bluesman qui chante en français. Ses chansons développent les thèmes chers au blues, le mal-être, la séparation, la route, les rencontres de comptoir, la dureté de la vie et du travail, enfin tous ces trucs qui justifient ou donnent le blues.

C'est un blues poisseux, un truc qui vous colle aux godasses, que parfume ça et là un air de boogaloo ou de musique zydeco, le tout zébré de riff de guitare. Après quelques morceaux en trio, Lenny présente son invité, natif de Doizieux, qu'il semble tenir en haute estime. Dès le morceau suivant on comprend pourquoi. L'accordéon de Pascal Rosiak c'est un peu le soleil qui perce le brouillard du blues de Lenny. Ces deux musiciens se comprennent à demi-mot. A partir de là, le concert va prendre une autre dimension. Avec l'apport de l'accordéon, les compositions de Lenny se présentent sous un jour nouveau. La redistribution des rôles dans le groupe, en plus des couleurs nouvelles de l'accordéon, donne plus de liberté au guitariste. Pour arriver à ce résultat, il faut être capable de remettre en questions ses propres compositions et ses habitudes. Chapeau monsieur Lafargue!

Il faut également souligner le soutien impeccable de Julien Bigey et Aurélien Gody, tout au service de leur leader et de sa musique.

Michel Mathais

(Lenny Lafargue: guitare, voix ; Julien Bigey: batterie ; Aurélien Gody: basse ; invité Pascal Rosiak : accordéon)

EYM trio à Un Doua de Jazz

Après les Balkans la veille, retour au jazz pour le 18ème "Un Doua de Jazz". Au programme deux trios "classiques" piano / basse / batterie comme on en voit tellement souvent.

On commence par le EYM trio. E pour Elie Dufour, le pianiste ; Y pour Yann Phayphet, le contrebassiste et M pour Marc Michel le batteur, donc. Ce trio n'est pas du tout intimiste, on est frappé d'emblée par la puissance du jeu partagé entre le pianiste et le batteur. On a l'impression d'une cordiale rivalité entre les deux ou pour le moins une saine émulation. Il en ressort des dialogues soutenus entre piano et batterie, que ce soit pour des reprises (Joshua, Nardis, Paranoid Android de RadioHead ...) ou pour leur compositions. Au centre, Yann arbitre et calme le jeu.

Ce pianiste, on l'avait déjà noté lors de son passage à l'AmphiOpéra (en mai dernier), est doté d'une belle technique mais aussi d'un joli phrasé.... on va en entendre parler.

Pascal Derathé

Baptiste Trotignon à Un Doua de Jazz

Baptiste Trotignon arrive avec un bel équipage à l'Espace Tonkin, à la batterie Dré Pallemaerts un magicien du genre et à la contrebasse Diego Imbert himself. Sacrée affiche dont les organisateurs sont très fiers. Déjà il y a deux ans, ils avaient réussi à programmer Tigran. Le piano réussit à Un Doua de Jazz.

Avec Baptiste Trotignon on change de registre tout en restant dans la qualité. Le jeu est très élégant, tout en finesse. La musique circule équitablement entre les trois protagonistes. Le Share trio ne vole pas nom. L'ambiance est feutrée, la lumière réduite à sa plus simple expression (Un "Doua" de lumière en plus aurait été bienvenu pour apprécier pleinement les attitudes). Comme souvent, l'Espace Tonkin aura accueilli un concert de haut niveau.

Pascal Derathé

Sugarcoat trio à la Clef de Voûte

"...trinan todas las aves del invierno...Pero solo tu voz escucho y sube
Tu voz con vuelo y précision de flecha,...vuelve tu voz cargada de violetas
Y luego me acompana por el cielo" *
(Pablo Neruda, La centaine d'amour)

Une bonne prescription pour la crise, et l'hiver qui vient : Sugarcoat trio. Après un "Caravan" de douceur (Smooth caravan), Marion Amirault au chant nous propose son nouveau trio. Une mantille de chanson d'amour, un enrobage de sucre qui fera passer la pilule de la rigueur, des désillusions et dévaluations en tout genre. A la Clef de Voûte avec Sugarcoat trio ce vendredi, nous avons pris la medecine musicale qu'il nous fallait pour nos oreilles et notre cœur avec aussi la jolie guitare de Oriol Martinez Codinachs et les battements de la contrebasse de John Zidi l'indéfectible. Un répertoire renouvelé de façon intégrale (excepté My favourite things et le métamorphosé Dat Dere de Bobby Timmons, ou comment, ici et maintenant préparer le retour du printemps...) : Comes Love, How deep is the ocean (vous savez Sinatra, et Harrison George avec son Ukulele), My one and only love (dédié à Neige- alias Lulu pour les intimes, feignant l'indifférence royale des habitués de club de jazz), This can't be love... Marion s'excuse presque de chanter beaucoup de chansons d'amour : cette fille est un cadeau, le printemps en automne : Up jumped spring, et les lapins avec leur sugar coat cabriolent dans les prés : elle a des papillons dans la voix et les papillons viennent se poser sur les fleurs que le guitariste lui tend en bouquets. Et les rythmes de la terre viennent chanter sous les doigts de John. Musique légère parfois minimaliste pour une voix légère comme un oiseau ou un papillon. J'ai regardé autour de moi : le public en silence est comme dans une prière un peu profane. Si peu.

Le deuxième set est délicieux comme le premier : I'm old fashioned (autant qu'Alice au pays des merveilles peut l'être). Hommage à Cole Porter You'd be so nice - la délicate façon de demander à l'aimé de revenir à la maison, Spring can realy hang up the most, le printemps encore, la mélodie comme une hirondelle de retour, les notes comme des papillons Le trio est bien calé et les baisers des notes -My Idéal (pardon si je détourne le sens des paroles) tombent justes, nos oreilles le savent bien. Et pour la gorge de Marion, c'est Erysimum (compositeur inconnu), le thème qui apaise, sans détour aucun). I'm all right, hommage à Madeleine Peyroux.

Etre simple c'est parfois très complexe et difficile. Le trio y réussit avec bonheur. Des introductions et fins de thèmes soignées, des chorus dépouillés, chantants aussi bien à la contrebasse qu'à la guitare, une pulsation solide, des tempos up -sportifs dit Marion- parfois.

Une soirée d'émotion et d'humour. A bientôt Sugarcoat !

Bernard Otternaud

(*...les oiseaux de l'hiver ont commencé leurs trilles, ...mais je n'écoute que ta voix et elle monte, Ta voix de son vol aussi précis que la flèche, ...elle revient ta voix et chargée de violettes, Elle monte avec moi à la fin dans le ciel"

Ompa Bompa pour le RhinoJazz(s) à St-Joseph

Si la sympathique petite commune de Saint-Joseph collabore avec le festival depuis fort longtemps, c'est aussi la seconde fois que le Rhino programme Ompa Bompa, valeur montante du paysjazz ligérien. Après sa précédente création "Duke, Jungle ?", cette belle brochette de sept musiciens mûrit depuis bientôt deux ans son nouveau répertoire, "To Our Dearly Beloved". Le concert de ce soir a une saveur toute particulière puisqu'il marque à la fois le retour sur ses terres du pianiste-compositeur Emmanuel Déplaude, l'enfant du pays, et la sortie du tout-nouveau-tout-beau CD du groupe. Si ce n'est déjà fait, je vous invite donc à lire la chronique de cet enregistrement en début de page (cf ci-dessus).

Niko Rodamel

Annah Cruz à la MJC de Claix

Le 1er souper-concert de la saison à la MJC de Claix avec Annah Cruz trio a fait le plein. Une belle opportunité pour allier les émotions musicales et les saveurs.

Annah Cruz qui sait se faire désirer, chante, accompagnée de deux compères depuis vingt ans, Pascal Fancea à la contrebasse et Pascal Perrier au piano. Autant dire que nous sommes avec des passionnés ! L'agréable surprise vient, ce soir, de la participation d'un ami, Ivan Baldet au sax.

Sur It's wonderful, Annah nous régale de sa voix chaude et grave. Le rythme de la Bossa est réchauffé par le sax. S'en suit un long passage instrumental, léger, qui nous transporte. C'est un ensemble d'artistes qui nous régale ce soir, sur des airs de bossa et de samba sans tristesse, comme un vin qui ne donne pas l'ivresse...

Une alternance subtile, légère, charmante et toute personnelle de jeux entre les musiciens et la chanteuse.

Le public s'est laissé envoûter...

Chantal Hardy

Le Alzy trio & Tamanga Bévis à la Frise

Cette petite salle au fond du restaurant La Frise n'ouvre le soir que pour les amis. Murs paille et orangés garnis des œuvres d'Eugénie Fauny dont le vernissage a précédé la soirée, parquet ancien et le public qui se serre pour écouter l'Alzy Trio.

Une première partie instrumentale nous régale de mélodies empreintes de poésie, ancrées dans notre mémoire. Elles nous accompagnent sans tristesse : La Chanson de Maxence, Cécile ma fille, Un été, la Chanson des Jumelles, Les feuilles mortes .... Le swing de la bossa-nova et du jazz, le souffle des vents du sud, les berceuses de notre enfance...

Dans la seconde partie, la voix nette, harmonieuse, langoureuse de Tamanga Bevis, ses grands sourires accompagnent le son doux des guitares. Que reste-t-il de nos amours ? Ca balance, ça tangue... Puis La javanaise, mélodie pleine de tendresse. Les paupières accompagnent l'émotion, la voix tient la note...

Sur des musiques latino-américaines, Bessame mucho bien sur, sa voix devient plus puissante, profonde sur des rythmes tout en finesse... Une silhouette mince, gracieuse en robe vert pâle sur une peau brune auréolée d'une coiffe noire scintillante accompagne une voix exceptionnelle d'émotion ! Un petit bijou !

Pas étonnant que le rappel du public envouté soit Isn't she lovely ?

Chantal Hardy

(Alzy Trio : Christian Sanchez: guitare ; Pascal Kober: basse ; Thierry Rampillon: guitare + Tamanga Bévis (chant) qui est invitée sur le deuxième opus de l'Alzy Trio, "French Song book")

Kornazov's Horizons quintet au Jazz Club de Chambéry

Ce concert programmé par Savoie d'Jazz Festival nous a fait découvrir un excellent quintet composé de pointures. Gueorgui Kornazov, tromboniste bulgare, a composé un répertoire de choc, coloré de sonorités puisant aux sources de ses origines.

La musique de Gueorgui, soutenu par une rythmique sachant associer la puissante régularité de Marc Buronfosse à la contrebasse, la précision et la délicatesse de Karl Jannuska à la batterie et la vibrante musicalité de la guitare de Manu Codjia, a diffusé un souffle bulgare plein d'énergie et de vitalité où la verve et le dynamisme d'Emile Parisien trouvaient leur pleine mesure.

Les compos de Gueorgui du premier set Petite Berceuse, Na Tony (pour Tony), Za Roumen (pour Roumen), Pour Henri, et Zalez furent jouées séparément tandis que le deuxième set se déroulait sans interruption pour Children Song, Véronique, Eternité, Tango de Mars', Balkan Spirit, Sila et Love Song, inattendu pour certains spectateurs, captivant pour d'autres.

A diverses reprises, Emile et Gueorgui sortirent de la scène laissant leurs compères Marc, Manu et Karl dialoguer ensemble ou s'exprimer en chorus maîtrisés et d'une grande présence, autant ovationnés que les retours sur scène de Gueorgui et Emile par un auditoire concentré et sous le charme.

Jack Urvoy

vu le samedi 15 octobre 2011

Open Gate trio et l'Orchestre des Pays de Savoie créent le concerto pour trio

L'Orchestre des Pays de Savoie, sous la Direction de Nicolas Chalvin, a commandé à Emmanuel Bex en 2009 une pièce pour orchestre et trio de jazz. C'était à peu près le seul cahier des charges. Emmanuel Bex est sorti des sentiers battus en allant chercher une inspiration du côté de Béla Bartok. Ce compositeur hongrois né en 1881 et mort à New York en 1945 a été un des pères de l'ethnomusicologie. Il a sillonné très tôt les campagnes de son pays, et autour, pour mémoriser, en les transcrivant, en les enregistrant, les musiques populaires et folkloriques, avant qu'elles ne s'éteignent à jamais. La structure de ces oeuvres a beaucoup inspiré sa musique. C'est donc autour du répertoire de Bela Bartok qu'Emmanuel Bex a écrit un concerto pour trio (de jazz) en trois mouvements qui sera créé ce soir en public.

Le concert débute par l'orchestre seul. Une "petite" formation de quatorze violons, trois violoncelles et une contrebasse. C'est encore un orchestre dit "de chambre" ou plus exactement "de Haydn". Nicolas Chalvin dirige quelques Danses roumaines et Danses transylvaniennes. Cette musique dite classique est légère, gaie, parfois frivole. L'orchestre de cordes se manœuvre comme un pur sang et répond "à la baguette". Arrive ensuite le trio Open Gate avec Emmanuel Bex à l'orgue Hammond, Simon Goubert derrière son toujours aussi imposant mur de cuivre et le facétieux Francesco Bearzatti à la clarinette et au sax. Le trio reprend les Danses roumaines. On vient d'en avoir une version "classique" ... celle du trio est méconnaissable, la même musique, mais triturée par les trois comparses, jazzy, plus familière à nos oreilles.

Troisième temps du concert, arrive le plat de résistance avec le concerto pour trio. Pour diriger l'orchestre il faut quelqu'un "de la maison jazz", c'est Franck Tortiller qui a été convié à prendre le pupitre. Le cérémonial est respecté, les musiciens se lèvent à son entrée, on va saluer le premier violon. Franck nargue Emmanuel en lui montrant son beau costard sombre de rigueur et c'est parti.

La fusion attendue entre les deux formations se met en place. Devant les trois trublions du jazz, derrière l'orchestre un peu guindé mais qui ne tarde pas à se décrisper. Même si elles ont travaillé ensemble depuis plusieurs mois, on voit au début des regards interrogateurs ou surpris du côté des violons, quand Emmanuel dans son élan pousse ses cris coutumiers ou quand Francesco se lâche au ténor. Puis l'étonnement des premières minutes laisse place aux sourires complices. Les cordes viennent soutenir les envolées du sax. Simon Goubert donne le tempo quand il ne tire pas la locomotive dans un solo à sa manière.

L'interaction entre les deux orchestres se fait naturelle et on oublie qu'il pourrait s'agir de musique classique. Le concerto explore des voies musicales nouvelles qui marient harmonieusement des styles que l'on ne rencontre habituellement pas ensemble. L'inspiration prise chez Bartok est tout à fait judicieuse et les compositions et arrangements d'Emmanuel Bex fonctionnent merveilleusement.

Cette rencontre a fait l'objet d'un enregistrement en studio dont le disque a été présenté à l'issue du concert.

Pascal Derathé

Youn Sun Nah au théâtre de Roanne

A l'initiative de l'association du Papillon Bleu, Youn Sun Nah se produisait à Roanne, sur la scène du Théâtre où le public était venu très nombreux remplir tous les sièges de velours rouge. Avant de la découvrir, c'est tout d'abord son complice le guitariste Ulf Wakenius qui introduit le concert avec une de ses compositions où sa virtuosité s'exprime pleinement.

Après ce morceau instrumental, Youn Sun Nah arrive humblement sur scène, et interprète Calypso Blues, de Nat King Cole. Elle choisit ensuite de poursuivre avec un morceau brésilien joliment chaloupé.

Puis c'est une composition personnelle : Answer to my love, ensuite une chanson traditionnelle coréenne, puis une composition de Ulf le guitariste : Breakfast in Bagdad, un passage du concert très intimiste.

Toujours forte de son éclectisme, Youn Sun Nah revient à sa grande passion, la chanson française, et nous livre un vibrant hommage à Léo Ferré sur la chanson Avec le temps, dans une version qui me donne des frissons, et le public ne s'y est pas trompé avec un très long applaudissement. Youn Sun Nah est elle-même émue de cette réaction du public.

Elle continue de nous surprendre avec un morceau plutôt blues de Tom Waits : Jockey Full Of Bourbon, puis un magistral Enter Sandman, hymne culte de Metallica, surprenant vous dis-je !

Le public réclame évidemment un rappel, et c'est simplement avec une petite boîte à musique et un long rouleau de papier que Youn Sun Nah revient dans la lumière du projecteur, pour nous enchanter (et nous apaiser, après un morceau de métal, il faut bien ça) avec la reprise Same Girl de Randy Newman.

Christian-Cyril Cordat

What's up doc ? au Hot-Club de Lyon

Vous ne connaissez pas What's up doc ? L'ébouriffant (avec tout de même une prédilection pour les calvities) combo (guitare, contrebasse, sax trompette et percussion) de renommée internationale (ils reviennent d'une tournée triomphale à Swing city- dans la Marne et Poo-Poo-pi-dou-ville - dans le Cher) avec leur allure de caïd de la pègre de Chicago, leurs costumes à rayures et chaussures vernies bicolores, et un humour qui fait mouche, comme leur musique swing tendance rock (d'il y a longtemps), une prédilection pour les thèmes à la Cab Calloway et à la Luis prima, des chorus à la Cole Porter, des chœurs attendrissants, des effets à la Armstrong (Louis aussi). Cela ne se prend pas au sérieux, c'est propret, de bonne tenue et joyeux. Le public s'amuse.

Même Neige (alias Lulu pour un cercle restreint d'intimes) rêve de se voir photographier dans la pause de l'ami fidèle de La voix de son maître. Elle, c'est le critère ! Que sombre la morosité et meure la crise ! Le Hot Club (tout le monde connaît, c'est rue Lanterne) nous propose ainsi de joyeuses soirées auxquelles vous êtes conviés avec vos femmes, enfants, oncles et marraines, même les fées, surtout les fées !

Arrêtez de bouder !

Bernard Otternaud

Jean-Pierre Bertrand "Boogie Woogie & Blues trio" à Veauche pour le RhinoJazz(s)

On connaît le boogie-woogie comme genre musical essentiellement pianistique qui occupa la scène musicale afro-américaine des années vingt aux années quarante. On en connaît également les plus grands représentants Albert Ammons, John Hammond ou Pete Johnson. Mais les pianistes de jazz de l'époque comme Count Basie, Earl Hines ou Art Tatum intégraient également quelques boogies dans leur répertoire. De nos jours, quelques pianistes pratiquent encore le boogie comme genre unique, mais il est également inséparable de la danse, et ce depuis les origines.

A travers le concert de ce soir le RhinoJazz(s) nous a offert la possibilité de faire une expérience unique, celle de revivre pour mieux la comprendre, une période peu connue ou un peu oubliée de l'histoire des musiques afro-américaines. Grâce à Jean-Pierre Bertrand, fin connaisseur de cette histoire musicale et pianiste talentueux, les liens du boogie-woogie avec le blues et le jazz apparaissent comme évidents.

Ajoutons que la configuration cabaret de la salle, adoptée ce soir, avec tables et chaises disposées autour d'un espace à danser, ainsi que la présence de danseurs chevronnés sur la piste ajoutaient une dimension festive à l'évènement. On a pu observer que la connivence entre les musiciens habitués à jouer ensemble s'étendait également aux danseurs de plus en plus nombreux au fur et à mesure de l'avancée du concert, et ça aussi c'est exceptionnel.

Appuyé sur une rythmique solide, le pianiste nous a offert un programme de standards du blues, du boogie, du jazz ou de la chanson comme Swanee River, Lady be good, On the sunny side of the street, How long blues, propre à faire entendre les liens, filiations ou cousinages entre les différents genres de la musique américaine. Une belle leçon d'histoire, merci professeur Bertrand. Des leçons comme celle-là on en redemande.

Michel Mathais

(Jean-Pierre Bertrand: piano ; Lionel Grivet: batterie ; Yves Gariod: contrebasse)

vu le dimanche 16 octobre 2011

Gainsbourg in Jazz à L'horme pour le RhinoJazz(s)

Bel effort de la part de la ville de L'horme que de recevoir ce projet "Gainsbourg in Jazz". Dès qu'il y a plus de cinq musiciens ça pose un problème (de gros sous). Là, le projet monté par Matthieu Notargiacomo se compose de huit soufflants, d'un trio piano/basse/batt et d'un chanteur. Soit onze musiciens. Et comme ça faisait un peu maigre, ils ont convié l'école de musique et la chorale de L'horme sur la fin !

"Gainsbourg in Jazz", nous l'avions vu en début d'année et nous avions bien aimé. Il faut dire que l'exposition des plus grands titres de Gainsbourg sur des arrangements jazzifiés, ça "le fait".

Ce concert repose sur deux piliers. Tout d'abord les arrangements ciselés de Matthieu Notargiacomo et la présence scénique du chanteur Christophe Cérino. Les premiers thèmes seront plutôt sages histoire de ne pas désarçonner le public. On commence par un Poinçonneur des Lilas bien jazzy mais conforme à l'original. Suivra Marylou et un long medley de l'album "Melody Nelson"". Une fois le sujet bien calé on va entendre des exercices plutôt sympas comme cette chanson de Prévert aux accents reggae-jazz bien cuivrés. Christophe nous apprend que l'arrangement de Sea sex & sun à suivre était probablement conforme à ce que Serge aurait voulu en faire... on se retrouve avec un ragtime virant sur le new-orleans ! L'eau à la bouche devient un standard de jazz d'orchestre qui ne serait pas renié à Las Vegas.

Avec ce projet, on entend des chansons archi-connues de Gainsbourg sous une forme nouvelle sans que cela ne choque, tellement le personnage était "jazz".

Pour le rappel, nous auront même droit à la suite du "poinçonneur", écrite par Gainsbourg : le fossoyeur des Lilas, le même quelques années plus tard qui, à la retraite, creuse les tombes... des grands trous, des grands trous .. des trous de première classe.

Pour finir, l'orchestre est rejoint par l'école de musique et la chorale de L'horme (ça fait du monde sur scène) qui reprendront quelques standards comme Elisa.

Pascal Derathé

(Christophe Cérino: Chant ; Matthieu Notargiacomo: saxophone alto et arrangement ; Jean-Alain Boissy: saxophones alto et ténor ; Vincent Périer: saxophone ténor et clarinette; Karim Salmi: saxophone baryton ; Franck Boyron: trombone ; Loïc Bachevillier: trombone ; Félicien Bouchot: trompette ; Baptiste Sarat: trompette ; Remi Ploton: piano ; Francis Decroix: batterie ; Brice Berrerd: contrebasse)

Youn Sun Nah et Ulf Wakenius à Villars pour le RhinoJazz(s)

À voix exceptionnelle, lieu exceptionnel, en partenariat avec la mairie de Villars, Le RhinoJazz(s) accueillait Youn Sun Nah en concert dans l'église du lieu. Le concert reprenait dans un ordre un peu différent le programme donné hier à Roanne.

Dans cet espace inhabituel pour un concert, la lumière pénètre par les immenses vitraux du chœur derrière la scène créant ainsi une atmosphère particulière de recueillement. L'introduction d'Ulf Wakenius ne fait qu'amplifier cette impression. Lorsque la voix s'élève, elle est en adéquation parfaite avec l'endroit, comme si elle participait un peu au caractère sacré du lieu. Quand lentement, la lumière du jour décroît laissant place à un très bel éclairage, bien en rapport avec la situation, le public bascule dans le rêve éveillé. Car en ce qui concerne Youn Sun Nah, c'est avant tout un univers intérieur qu'elle nous fait partager à travers les émotions qu'elle nous transmet par sa voix.

Il n'est que de voir et de sentir nos propres réactions et celles des spectateurs lors de l'interprétation toute de sensibilité d'Avec le temps. Les longs applaudissements du public debout pendant plusieurs minutes en témoignent, l'émotion est telle que des larmes coulent sur les joues de l'interprète et de certains spectateurs. Pour qui a eu la chance de voir et d'entendre quelquefois Léo Ferré sur une scène, on est, avec l'interprétation de Youn Sun Nah, au plus près de l'émotion que pouvait transmettre Léo. Cette chanson a donné lieu à des reprises nombreuses, mais c'est sans doute la plus belle et la plus émouvante que j'ai entendue à ce jour.

En premier rappel Youn Sun Nah nous offrira Enter Man, puis en second rappel, seule, Same Girl.

Michel Mathais

Kareyce Fotso à Pavezin pour le RhinoJazz(s)

Encore un choix improbable de la programmation du RhinoJazz(s), qui a offert en guise de scène une église nichée dans le Pilat à la jeune chanteuse camerounaise Kareyce Fotso. Pas complètement inconnue, nous l'avons vue en février à l'AmphiOpéra, elle a été lauréate d'un prix de la jeune création en 2009, mais ici à Pavezin, ce n'est pas la même histoire. La confiance dans le RhinoJazz(s) a fonctionné à plein et l'église est pleine.

En quelques minutes, Kareyce réussit à se mettre le public dans la poche. Sa spontanéité, son sourire et sa grâce rayonnent et touchent tout le monde. Elle chante accompagnée d'une simple guitare. Elle nous parle de la jeunesse dans son pays, de pauvreté, d'injustice, d'incompréhension entre les peuples. Elle embrasse large et abordera les problèmes d'écologie et de déforestation, de mariage forcé etc... La voix est puissante et emplit sans problème la petite église.

Le one woman show se poursuit avec d'autres instruments comme la sanza, théoriquement réservée aux hommes mais qu'elle a réussi à apprivoiser avec un Maître. Elle chauffe ensuite la salle à l'aide d'un petit tambour traditionnel ("Anngakala"?), elle embarque le public qui ne s'y attendait pas trop et arrive à faire chanter tout le monde. Les visages sont passés en mode "banane".

Le courant est passé entre cette boule d'énergie et le public de Pavezin, qui ne s'attendait pas à une telle prestation.

Pascal Derathé

(Les photos publiées ici ne sont pas libres de droit et appartiennent à leurs auteurs qui seuls peuvent vous accorder un droit de reproduction. Si vous souhaitez en utiliser une ou plusieurs, prendre contact avec la rédaction de Jazz-Rhone-Alpes.com)