Edito (Lundi 9 juillet 2007):
Une belle semaine en perspective
Comme presque toujours à Jazz à Vienne, la seconde semaine est toujours riche en évènements. Vous avez rendez-vous ce soir avec Joshua Redman dans un trio majeur, et avec le Charles Tolliver Big Band que l'on n'a encore jamais vu. Demain, les instants seront tout aussi beaux : avec Sara Lazarus, Bireli Lagrène et André Ceccarelli d'une part et surtout Joe Lovano de retour à Vienne dans un concert qu'on espère aussi beau qu'il y a deux ans. Pour le reste, attendez-vous à retrouver Manu Dibango, Clark Terry Eric Legnini, Bojan Z et une vieille figure elle aussi incontournable des évolutions du jazz contemporain, Archie Shepp. Dommage, fidèle à sa tradition, le festival bouclera ses valises le 14 au matin. Soit donc un samedi matin. On peut toujours rêver que poussé par une inspiration de dernière minute, Jean-Paul Boutellier a rajouté en dernière minute une ultime soirée . Qui aurait-il bien pu inviter ?
Au programme le lundi 9 juillet 2007:
Scène de Cybèle
- (16h00): Ensemble de jazz de l'école de musique du SIM
- (17h30): E.T's corporation
- (19h00): Verydik
Théâtre antique
- (20h30):
suivi de
- (22h00):
Jazz Mix
- Pas de Jazz Mix ce lundi
Club de Minuit
- (23h30): Bojan Z trio
Les improvisations picturales (voir ici...)
Tous les concerts sont gratuits, excepté le concert du Théâtre Antique (voir tarifs ici)
Ce soir au Théâtre Antique (lundi 9 juillet 2007):
Joshua Redman trio et Charles Tolliver Big Band
Il a mis quelques temps Joshua à ne pas être seulement le fils de son père, Dewey Redman qui reste aujourd'hui encore synonyme d'une des musiques les plus fécondes qui aient été.
Plusieurs albums plus tard et après moult expériences, Joshua Redman a réussi ce tour de force d'être l'un des grands acteurs de la scène jazz actuelle tout en ne s'y limitant pas. Saxophoniste doué, débridé, capable de jouer à peu près tout, il a effectué quelques grands ponts musicaux, réunissant à sa façon toutes les influences qui ont pu toucher sa musique, des Stones à Stevie Wonder, d'Eric Clapton, Cream et post-Cream et bien sûr Ornette Coleman.
Il sera ce soir à Vienne dans une configuration on ne peut plus traditionnelle, en trio (basse + batterie). Pour les amateurs de la formule, aucune inquiétude à avoir, le saxophoniste sera sur scène avec son trio, Reubert Rogers à la basse et Eric Harland aux drums. Avec eux deux, déjà présents dans un travail précédent (Passage of Time), il vient d'enregistrer un nouvel album. Nul doute qu'il nous en parlera une fois sur scène.
La venue de Joshua Redman est d'autant plus appréciée que cette édition n'a pratiquement pas programmé de tels trios dans cette édition consacrée au vocal, à l'exception d'EST, d'inspiration toute différente.
Spécial Big Band
En première partie, on fermera les yeux pour découvrir et écouter un Big Band, un vrai dirigé (et c'est peu dire) de main de maître par Charles Tolliver, trompettiste de son état, presqu'inconnu alors qu'il n'a cessé de donner la réplique à de nombreux saxes et qu'il a tenu le pupitre ad hoc d'innombrables formations. Peut-être d'ailleurs a-t-il déjà rendu visite à Vienne dans les valises de Gillespie ou d'un autre.
Par ailleurs, débarquant à Vienne avec de nombreux compagnons de route dont de vieux briscards de la scène américaine, Charles Tolliver prend le risque de jouer ses propres compositions, à charge pour les solistes de faire le reste du travail. Au vu des pointures qui seront sur scène ce soir, on risque de s'amuser.
Vu au Théâtre Antique dimanche soir (8 juillet 2007)
Spirit Of New Orléans : un ersatz de Katrina s'abat sur le théâtre antique
C'est sous une pluie battante que les musiciens de Spirit of New Orleans ont commencé ce qui s'annonçait comme un très bon divertissement. Malheureusement, l'orage aura eu raison de leur enthousiasme.
S'il y a bien une chose que Katrina n'a pas emporté dans son passage, c'est bien le Spirit of New Orleans. Du swing entraînant, où l'habilité du pianiste Gérard French est en parfaite adéquation avec l'énergie des cuivres de Wendell Brunious, Freddy Lonzo, Evans Christopher et bien sur de Mark Braud, le meneur de cette formation.
Dans leurs bagages, il semble que ces musiciens virtuoses aient emmenés le climat humide et chaud de leur Louisiane natale. C'est en effet des trombes d'eau qui se sont abattues sur le théâtre antique, obligeant la production a faire couvrir le piano d'une bâche alors que ce dernier était encore en train de jouer.
Alors que le déluge redouble d'intensité, Lillian Boutté est obligé d'interrompre sa prestation, au grand dam du public qui jusque là ne s'était pas laisser impressionné par tant de pluie.
En dépit de la frustration engendrée par cette interuption forcée de leur concert, les membres de Spirit of New Orleans rencontrés ensuite ont tenu à saluer le public qui était resté nombreux dans ces conditions exécrables, preuve s'il en est de son appétence pour cette musique.
Interview de Jean-Paul Boutellier : Le Come back essentiel du New Orleans
Pour quelles raisons, Jazz à Vienne s'est toujours détourné du style ou de l'approche "New Orleans" et pourquoi, au contraire, une soirée entière lui était consacrée cette année. Confidences de Jean-Paul Boutellier, fondateur et programmateur de l'évènement
Le New Orleans est cette année à l'affiche du Festival. Par le passé, ne pensiez-vous pas que ce style n'avait pas sa place à Vienne ?
JP Boutellier: Sur ce sujet-là, il vaut mieux être précis. Je n'ai jamais voulu faire du revival car il y a des choses que je n'aime pas dans le revival. Il s'agissait de faire revivre presque note après note ce qui avait existé avec un souvenir naïf et nostalgique. De ce genre de choses, je n'ai jamais eu envie.
En revanche, des choses un peu différentes arrivent et surtout, il s'est passé quelque chose à la Nouvelle Orléans qui a anéanti quasiment la ville, qui a anéanti ce que je considère de plus en plus comme le berceau de cette musique. De là sont venus les premiers grands musiciens. Ce n'est pas pour rien que Amstrong, Bechet, Jerry Roll Morton et combien d'autres viennent de là et non de Memphis ou d'ailleurs. Ca a donc été le berceau de quelque chose qui a rejailli sur l'Amérique et le monde entier.
Et, après ce qui s'est passé, je suis très peiné et inquiet : a été dévasté ce que des siècles avaient construit et auquel nous, les petits Français, avions contribué fortement : c'est nous qui avons créé cette ville qui n'était pas faite pour être une ville. Des gens se sont attachés à faire ça et ce faisant, ont créé quelque chose qui n'était pas réellement une colonie. Des gens qui ont apporté un petit peu de l'esprit français et européen et qui ont contribué à faire de cette musique ce qu'elle est. Ce n'est pas pour rien que dans le jazz il y a un petit peu de musique française d'une certaine époque.
Récemment donc, a eu lieu un cataclysme et finalement, on s'aperçoit que rien n'est fait pour réparer les choses. On va certainement reconstruire une petite ville touristique mais tout le reste certainement pas : il n'y a aucune volonté. Je dirais même qu'il y a une volonté inverse des Américains de refaire de cette cité ce qu'elle était, c'est-à-dire un élément vivant et qui a continué à vivre. J'insiste : La Nouvelle Orléans a continué à être le berceau de musiciens qui ne s'exprimaient d'ailleurs pas dans un style revival.On parle beaucoup de l'œuvre des Marsalis, mais il y en a eu beaucoup d'autres qui ont été formés là-bas. D'où cette soirée à Vienne qui était pour moi d'autant plus une soirée de fête que deux types de groupes étaient présents : le premier, c'est toute cette musique populaire qui a produit des Fats Domino et autres. On a tous dansé là-dessus et Fats Domino a permis à beaucoup de gens de découvrir le Jazz. Et puis il y avait un orchestre composé de quelques-uns des meilleurs musiciens qui ne sont d'ailleurs pas toujours originaires de là-bas : un des leaders de l'orchestre est d'ailleurs d'origine européenne mais est allé vivre là-bas pour continuer à travailler dans un style qui n'est ni du dixieland ni du revival mais qui conserve une certaine nostalgie de la musique d'antan.
Mais je le répète, je n'ai rien contre le New Orleans en tant que tel. C'est toujours difficile de programmer cette musique d'ailleurs parce que, quand on n'en programme pas on se voit reprocher de ne pas aimer cette musique et quand on la programme on vous reproche l'inverse. Il est difficile de trouver la bonne ligne médiane.
Recueillis par Jean-Claude Pennec (avec la complicité de Citizen Jazz)
Ca s'est passé samedi soir au Jazz Mix (samedi 8 juillet):
Mark de Clive-Lowe: Freesoulsession feat. Bembe Sehue, Tawaih et Jason Yarde
Place à l'électronique en ce samedi soir au Jazz Mix. Mais l'alchimie des Freesoulsessions du Jazz Café de Londres ne fonctionne pas.
Le prolifique claviériste arrangeur Mark Clive Lowe débarque à Vienne pour une première française. Accompagné des musiciens avec qui il aime travailler (Jason Yarde au sax, Richard Spaven à la batterie, Bembe Segue et Tawaih aux chants), il importe le concept de Freesoulsession sur le sol hexagonal. Avec plus ou moins de succès.
Sa musique, essentiellement basée sur du gros son électronique trafiqué à outrance, a du mal a séduire le public pourtant venu nombreux en ce samedi soir. Ses délires musicaux, rappelant vaguement des influences soul, afro beat et cool jazz, sont trop souvent hasardeux. On comprend pourtant bien pourquoi le premier album de ce jeune harmoniste moitié japonais moitié new zélandais a fait l'objet de nombreux remix de la part des plus grands DJ mondiaux.
Le concept de Freesoulsession, créé à la base pour permettre aux musiciens de jazz de venir faire leur preuve dans une joyeuse improvisation est ici détourné de sa forme originel. Ici, le peu de place laissé à l'improvisation laisse sur sa faim, et enlève une grosse partie du charme de l'exercice.
Cultivant chacun de leur coté un projet musical bien différent, les musiciens présent sur scène réussissent tout de même à évoluer dans la même direction, celle du tout électronique. Mais ils restent trop dépendant des visions musicales débridées du meneur de bal, qui du coup à du mal à faire rentrer le public dans son univers pourtant large et éclectique.
Partant d'un concept intéressant et très peu répandu en France, Mark de Clive-Lowe manque malheureusement le coche pour intéresser les spectateurs à sa passion des Freesoulsessions. Pour preuve, la terrasse du Jazz Mix n'a jamais connu une telle affluence, alors que la salle ne cesse de se vider. Un concert en demi teinte, qui on l'espère n'empêchera pas Mark de revenir en France produire sa musique si particulière, où il respectera cette fois ci le principe d'improvisation qui fait le charme de ce type de concert.
Pascal Percie du Sert
Site officiel : www.markdeclivelowe.net
Galerie de photos
Théâtre Antique 8 juillet 2007:
- Mitch Wood
- Spirit of New Orleans
Jazz Mix 7 juillet 2007:
- Mark de Clive-Lowe
LES TARIFS
Entrée au Théâtre antique :
- Tarif normal : 30 euros
- Collectivités : 27 euros
- Etudiants :
- Jeunes 12-16 ans accompagnés : 19 euros
- Billet supplémentaire abonné : 19 euros
- Moins de 12 ans : gratuit mais le billet est obligatoire et doit être retiré au guichet le soir du concert.
- Billet espace réservé : 52 euros (HT)
Abonnements :
Abonnement individuel 7 soirées ;
- Tarif normal : 125 euros
- Collectivités, étudiants : 115 euros
- Billet supplémentaire abonné : 19 euros